Si mon changement de consommation a commencé par l’alimentation il y a quelques années, il s’étend aujourd’hui à tous les niveaux de mon quotidien. Je vous ai déjà parlé de plusieurs pistes à réaliser à son rythme (ici) et aussi raconté plus en détail cette nouvelle approche de la nourriture (ici), c’est donc tout naturellement que j’ai voulu continuer le combat en abordant deux thèmes dans le domaine de la mode : le made in France et la seconde main. Cette fois-ci je ne parlerai pas de moi, mais des autres. A vrai dire, je suis partie de mon expérience personnelle tout de même: si aujourd’hui je regarde les étiquettes pour tout et je n’achète absolument plus de vêtements fabriqués en Asie ni n’accepte professionnellement de shootings pour ces marques, je continue bien évidemment d’acheter des vêtements et vous n’êtes pas sans savoir si vous me suivez depuis un moment que je suis devenue maman il y a deux ans et qu’un enfant grandit à une vitesse folle. Je privilégie le made in Europe même si je suis évidemment plus sensible au made in France pour plusieurs raisons (production locale = mois de bilan carbone, valorisation du savoir faire français, lutte contre le chômage et à plus grande échelle rejet total de la fast fashion qui pollue énormément et exploite les ouvriers). Mais j’ai surtout découvert une passion pour la seconde main, je connais tous les bons plans des friperies et autres boutiques solidaires dans un rayon de 50 km autour de chez moi (aller, je vous partage toutes mes adresses sur l’appli Mapster @mariepaola_bh). Promis j’en parlerai un jour dans un post uniquement dédié à mon approche, mais d’abord je donne la parole à ceux et celles qui ont répondu à mon annonce postée sur les réseaux sociaux:
« Pour deux projets photos je recherche des personnes pour qui la seconde main fait partie intégrante de leur consommation de vêtements, et des créateurs Made in France ».
Bam, rien que ça. Je suis fière après un an de rencontres d’enfin partager tout cela avec vous. Sous forme de portraits et de questions précises, j’ai appris à connaitre et comprendre ce qui animait ceux et celles qui ont répondu présents. Je vais donc vous présenter des jeunes qui ont changé et/ou veulent changer l’image de la mode.  Aujourd’hui, je commence par le thème vintage en vous présentant quatre jeunes femmes pour qui chiner est vrai moyen de consom’action. En plus de vous raconter pourquoi elles font ce choix, elles vous livrent leurs anecdotes et bonnes adresses, mais surtout elles vous montre avec leurs looks entièrement de seconde main pour l’occasion, que l’on peut être canon et branchée avec des sapes chinées! Le but de ces portraits est de vous donner envie de regarder de plus près les pépites des friperies/vide dressings/vide greniers/sites et appli internet mais aussi de casser un peu les mauvais clichés qui peuvent parfois freiner. Ce qui m’a fasciné au cours de nos échanges a été de réaliser qu’elles comme moi, nous nous rappelons exactement où, avec qui et à quel prix nous avons fait affaire de ces petites pièces « uniques ». Allez, à vous la parole mesdames! Et vous mes lecteurs, êtes les bienvenus pour donner votre avis sur le sujet, bien évidemment!

NB: Les créateurs made in France s’étant aussi prêtés au jeu devant mon objectif feront l’objet d’un prochain article uniquement dédié à eux. Tous mes portraits et rencontres se sont déroulés à Paris avant mon départ en décembre 2018.

Josephine : « La seconde main s’est imposée à moi comme solution écologique par excellence ».

Josephine - Projet Seconde Main

Josephine est la première que j’ai rencontrée pour ce projet. Elle a 22 ans et étudie à Sciences Po en économie publique. Elle écume les friperies depuis une dizaine d’années, et ses trouvailles font partie intégrante de ses tenues au quotidien. Mais elle a décidé d’aller encore plus loin. Depuis un an et demi elle n’achète plus du tout de vêtements neufs à l’exception d’une paire de chaussures. « J’ai toujours aimé chiner, pour tout et notamment pour les vêtements. Passionnée de couture, je retrouvais dans les brocantes et les friperies l’originalité et le plaisir d’avoir des pièces uniques, que l’on ne voit pas sur tout le monde. J’en achetais aussi beaucoup pour les customiser car c’était bien moins cher que des vêtements neufs ». C’est surtout le documentaire choc The True Cost (sur Netflix) et divers articles relatant pollution et conditions extrêmes des ouvriers textiles dans les pays lointains qu’elle a pris conscience du désastre environnemental causé par l’industrie de la mode fast fashion et qu’elle a décidé d’arrêter définitivement l’achat neuf. Par facilité et gain de temps (tri par tailles, chez soi au calme), elle achète de plus en plus de trésors sur l’application Vinted et privilégie la remise en main propre afin d’éviter les envois postaux. « Malgré tout j’ai des adresses fétiches : la friperie chez un ancien Coiffeur rue des Rosiers dans le Marais, Freepstar réserve aussi parfois d’excellentes surprises. J’aime beaucoup le Emmaus Défi de la rue Riquet et récemment découvert un dépôt vente dans les Batignolles : Cinq Août, ce sont des produits plus haut de gamme mais à des prix défiants toute concurrence. L’occasion de s’offrir une belle pièce de temps en temps. » Ses pièces chinées remportent d’ailleurs un franc succès auprès de ses amis avec qui elle troque même parfois ses trouvailles contre d’autres: « C’est ça pour moi l’économie circulaire ! ».
Sur ces photos, elle porte un manteau chiné chez Emmaus lors d’un voyage à Stockholm, une robe cousue main, et un chemisier chiné par sa grand-mère dans une brocante en Normandie. Un look totalement unique dont chaque pièce est associé à un souvenirs précis. Son astuce quand elle achète une fripe: un bon coup de machine à laver… et c’est tout!

Josephine a ouvert un blog écolo pour faire part de sa transition vers un mode de vie plus écoresponsable. Son instagram: @jo_lignac

Marie: « Ce n’est pas parce qu’un vêtement n’est plus porté par son propriétaire d’origine qu’il n’a plus de valeur, ou qu’il n’est plus fonctionnel. »

Marie - Projet Seconde Main

Marie a 20 ans et est étudiante en licence d’Histoire et de Communication après deux ans de classe préparatoire Littéraire. Cette passionnée de danse et photographie ne cache pas son gout pour la mode. Après une adolescence marquée par « l’envie frénétique d’avoir plein de fringues tout le temps » – et je sais ce que c’est, j’étais pareil – le côté financier a commencé à poser problème. Son rapport à la seconde main a donc d’abord été appréhendé par l’avantage économique qu’il représentait, mais petit à petit l’aspect écologique est entré en jeu. Pour elle, ce revirement était « une manière de consommer moins bêtement et d’arrêter le gaspillage ». Marie commence alors à se pencher sur la penderie de sa maman, et découvre le pouvoir sentimental que peut dégager un vêtement ou accessoire ayant appartenu à une personne aimée. « C’est un peu comme si la personne qui les portait avant m’accompagnait en quelque sorte. Et puis il y a parfois une histoire derrière des vêtements, qui fait que tu es plus content de les porter que s’ils étaient neufs. Par exemple, une fois j’ai shooté une blogueuse new-yorkaise qui venait de faire un tour d’Europe. Comme elle rentrait aux USA, elle devait vider ses armoires donc elle m’a littéralement donné 15 kg de fringues en bon état. Du coup quand je les porte, je me dis toujours qu’elles ont voyagé plus que moi ! » Derrière cette anecdote, une réalité indéniable est apparue aux yeux de Marie: sa penderie n’a plus besoin de nouvelles pièces sauf en cas de gros coup de cœur, ou en cas de réel besoin. Dans ce cas, son achat sera spécifique et non sous le signe de la flânerie. Dans tous les cas, la seconde main sera priorisée. Ses plans chine? Vinted, ses proches et même les mamans chez qui elle fait des baby sittings, des vide-dressings comme Violette sauvage ou encore des vide-greniers, le « meilleur endroit pour trouver des sacs de marque directement auprès d’une petite mamie trop mignonne ». Marie ne nie pas qu’il faut cela dit avoir les vraies bonnes adresses de friperies car pour le moment, elle y a fait choux blancs. « En fait, trouver de la seconde main de qualité demande une attention particulière et des recherches préalables (vérifier l’état de la pièce, regarder si telle adresse est sérieuse etc.) ». Une chose est sure, elle adore redonner l’utilité à une pièce qui le mérite jusque là délaissée; elle estime que ce n’est pas parce qu’elle n’est pas issue de la dernière collection qu’elle est trop vieille. Au contraire, cela permet d’avoir des pièces différentes de celles produites par milliers chaque semaine.
Finalement son look des photos reflète parfaitement sa conception de la seconde main: la robe appartenait à sa mère quand elle était plus jeune, les chaussures sont une bonne affaire car trouvées neuves sur Vinted pour une vingtaine d’euros (des Zara) et le sac vient de sa grand-mère qui elle-même l’avait acheté dans un vide-grenier.

Son instagram: @marinette_ph

Marie-Camille : « La seconde main demande de la patience, j’aime aussi ce rapport au temps. »

Marie-Camille - Projet Seconde Main

Marie-Camille a 29 ans; elle se décrit comme « hybride »: responsable de programmation dans une salle de spectacles, modèle et DA. « Je pratique le seconde main depuis toujours : je viens d’une famille avec plein de femmes, de cousines, de sœurs : on prête, on donne… Je vends ou donne moi-même régulièrement des vêtements ». Lorsqu’elle chine, elle pratique son shopping comme si c’était dans une boutique de neufs et regarde les vêtements de la même manière: elle recherche son style, regarde le prix, mais se laissera surtout séduire au coup de cœur pour LA pièce unique et originale pour son vestiaire qui regorge de pépites. « Récemment, j’ai acheté une paire de bottes Robert Clergerie à 22€ chez Emmaüs, c’est une collection ancienne bien sûr, mais les prix boutique des nouveaux modèles sont autour des 800€ ! Ça vaut le coup de fouiller. Chercher mieux, pour trouver quelque chose qui me correspond plus ». Mixant pièces neuves et de seconde main, ses habitudes d’achat représente 50-50 pour chaque sauf pour les vêtements de grandes marques pour qui elle privilégiera la seconde main. Ses bon plans? «En ligne sur Videdressing et Vinted, ou en boutique/brocante. La boutique Eponyme Vintage de mon amie Esther, à Faidherbe Chaligny est une caverne d’Ali Baba, que des belles pièces à petits prix». Mais cette consommatrice habituée de la seconde main et des vide-dressings et donc connaisseuse du marché a un message à faire passer : « Avis à celles qui vendent et qui font ça à des prix exorbitants… Vous vendez des fringues les ami(e)s, pas des lingots. A moins de haute couture, la marque n’est à mon sens pas un argument pour faire flamber son prix de revente ».
Sur ces photos, Marie-Camille porte un jean Levi’s et une casquette de marin chinés chez Kiliwatch, une marinière Jean Paul Gaultier offerte par sa tante, qui l’a porté avant elle; le manteau long, les escarpins Cosmo Paris et le sac Lancel ont été trouvés sur le site Videdressing, la ceinture est une petite pépite de chez Guerrisol.

Son instagram: @mariecamille.r

Marie: « J’aime acheter des objets qui racontent une histoire, qui parlent d’une époque ou d’un savoir-faire et je trouve que les habits de seconde main sont tout ça à la fois – en plus d’être moins chers que les neufs ».

Marie La Super Marquette - Projet Seconde Main

Marie a 30 ans. Elle est la patronne de la « Super Marquette », une boutique de souvenirs made in France dans le quartier de Beaubourg qu’elle a ouvert après des années à faire de la comm. A l’époque elle a tout lâché pour ouvrir cette caverne d’ali baba de produits « bien faits, jolis et bien français pour les touristes curieux mais aussi les parisiens ». Voilà comment j’ai rencontré Marie, dernière le comptoir de sa jolie boutique à la devanture rose. En plus de cette passion pour le made in France, on a découvert que nous partagions d’autres valeurs et notamment ce gout pour le vintage. « J’ai toujours chiné, ma mère me trainait petite dans tous les Emmaüs de France et les brocantes ont toujours été mon passe-temps du dimanche préféré ». Avant d’ouvrir sa boutique, Marie ne regardait pas vraiment les étiquettes, elle décrit même aujourd’hui ses vêtements fast-fashion de l’époque comme des cochonneries. « J’avais un meilleur salaire qu’aujourd’hui, et moins conscience de l’impact de mes achats ». C’est son nouveau projet professionnel qui lui ouvra les yeux alors qu’elle rencontre des fabricants français et apprend sur le savoir-faire et le travail respecté et respectueux… impossible alors de continuer une consommation sans réfléchir. « Je dirais que désormais 14 nouveaux vêtements-chaussures-accessoires sur 15 sont en fait de seconde main. Le 15e truc que j’achète est toujours fait en Europe – souvent en France – et donc généralement couteux! Acheter d’occasion est la meilleure des options pour moi. On trouve des choses de qualité, peu chères, souvent uniques… Mais c’est aussi faire un petit pas vers un environnement plus respecté, moins de gâchis, tout en assouvissant mon envie permanente de nouveautés et mes nouvelles idées de look sans culpabiliser ». Véritable addict à la chaine Guerrisol, elle avoue cela dit que ce n’est pas évident quand on n’a pas l’habitude, car oui c’est généralement le bordel et ça peut rebuter, notamment l’odeur de « vieillit » que l’on peut retrouver chez Emmaüs également. « Il faut aimer chercher, farfouiller, le côté chasse au trésor. Après, moi je trouve que ça vaut le coup de se boucher un peu le nez et de mettre les mains dans le cambouis : j’ai trouvé un nombre de trésors à moins de 10€ chez Guerrisol (un jean Marc Jacobs, un manteau en peau retournée années 60, le parfait 501, un mini sac années 40…) ». Vous l’aurez compris, Guerrisol c’est pour un niveau confirmé d’expert chineur. Elle conseille pour les plus frileux de la 2nde main de commencer par Vinted: « Tu peux y cibler exactement ce que tu veux, avec les marques de ton choix, et acheter chez les filles qui font de jolies photos, ça a un côté boutique en ligne assez chouette. Tu peux aussi acheter une version similaire à tes basiques absolus : par exemple, ce pull en laine que tu mets tous les hivers, tu peux sans doute le trouver de la même marque, même taille, autre couleur pour trois fois rien! Tu sais qu’il t’ira, que tu le mettras, pas de prise de risque! Ou tenter des trucs sur des accessoires. Je voyais partout des ceintures chaines, j’en voulais une mais la version Chanel sur Etsy à 300€, très peu pour moi. J’en ai trouvé une top à 12€ sur Vinted, et là voilà sur les photos! » Cela dit, elle trouve qu’en ligne on peut vite tomber dans le piège du tout-acheter-car-c’est-pas-cher, mais elle reconnaît que l’on peut trouver de belles pièces sur Ebay, Vestiaire Collective ou Videdressing. Aller, place aux bonnes adresses physiques: « Dans le 9e, j’aime beaucoup Mamie Blue pour les vraies pièces vintage (même si l’accueil est pas toujours au top), Chezel pour des pièces souvent chères mais de qualité et pile dans mes envies du moment (j’y ai trouvé un magnifique caban Vivienne Westwood en cachemire que je mets tous les hivers depuis!). Et sinon, une bonne brocante quand on part en weekend quelque part (même juste autour de Paris), ça marche à tous les coups! ».
Pour ce look sur les photos, Marie le décrit comme son uniforme classique: son jean taille haute chiné en brocante à Versailles (5€), un pull qui était à sa grand-mère, la ceinture de Vinted (12€), un manteau Burberry qui vient de chez Emmaus à Lyon (15€) offert par sa maman, une casquette en laine de chez Guerrisol (3€) et des boots Robert Clergerie sur Vestiaire Collective.

Son instagram: @lasupermarquette